Si l’adresse exacte reste un secret bien gardée… l’arrivée à Ultraviolet, la table expérience de Paul Pairet à Shanghai, a été décrite sous toutes les latitudes : le canal miteux aux faubourgs de la ville, le rideau de fer qui coulisse sur l’antre du bunker, l’ouverture théâtrale, « Ainsi parlait Zarathoustra », de Richard Strauss III, 10 convives- pas un de plus et tous ensemble- plongés dans le conte futuriste de Stanley Kubrick, les menus UV aux 22 épisodes, comme autant de scènes d’un space-opera…
Ouvert en mai 2012, par celui qu’on décrit comme le chef le plus innovant, le plus « grunge », le plus provocateur de sa génération, Ultraviolet reçoit la consécration suprême. Paul Pairet obtient les trois étoiles dans l’édition 2018 du Guide rouge Michelin. L’aventure, il le reconnaît cela a de quoi décoiffer, lui qui a opté pour la casquette de toile improbable, plutôt que pour la toque traditionnelle.
Références: Fier du parcours ? Paul Pairet :
Je suis en Chine depuis 2005. Michelin n’a créé sa version Shanghai qu’en 2016. Deux étoiles pour une première édition, trois en 2017. C’est vrai que d’un point de vue professionnel et français, Michelin reste comme la référence (bien qu’il ne couvre qu’une partie de la planète). Et Michelin a fait preuve d’une grande modernité en consacrant Ultraviolet qui est devenu le 3 étoiles le plus excentrique (au sens propre ex-center) de la galaxie « Michelinique ». Ultraviolet avait ceci dit intégré en 6 mois seulement le classement (étendu 50-100) des 50 World best Restaurant et y est resté jusqu’à ce jour (meilleure place 24ième / actuel 41ième)
Tomato Mozza and Again © Scott Wright
Références: On vous a entendu dire que le concept UV était l’ultime aboutissement de votre créativité ? Quel sera le prochain épisode de cette cuisine en immersion ? Paul Pairet :
Ultraviolet est un projet sans fin auquel je pourrai consacrer le reste de ma carrière. Ce sera de toute façon le projet de ma vie. D’autres projets verront peut être le jour mais sur des bases plus consensuelles, commerciales. Nous avons d’ailleurs ouvert cette année The Chop Chop Club qui est un restaurant très basique et que j’adore : avec un concept de pièces cuisinées entières (gigot d’agneau, turbot rôti à l’arête…) à partager avec l’ensemble du restaurant au travers d’un programme permettant de servir chaque plat à son pic ( parallèle avec Ultraviolet dans ce sens seulement)
Références: On vous a vu très présent au festival Omnivore des ultra-créatifs de la cuisine, des fous de recherche…au fait, où en est le canard laqué au Coca après plus de 45 essais ?en immersion ? Paul Pairet :
Le canard est Servi (au menu UVC ) ! Je ne suis pas en ce moment en phase de “recherche », mais en phase de consolidation de nos 3 opérations et en fin de cycle de création de quelques 80 recettes + celles qui ont été élaborées cette année entre l’ouverture de mon dernier restaurant Chop Chop Club et le renouvellement de certains plats de Mr & Mrs Bund. Ce sont des recettes relativement “simples” mais la mise en production est toujours complexe.
Références: Comment se passe une journée de Paul Pairet ?
Pas seulement, on imagine, dans les coulisses magiques d’UV ? Le labo ? le Bund ? Les marchés ? Paul Pairet : Nous sommes en phase de réglages, de bilans, de prévisions budgétaires, de projets de développement. Aucune journée n’est vraiment identique en fonction des priorités du moment. La “recherche” pure redémarrera probablement en début d’année, lorsque j’attaquerai (peut-être) le prochain menu d’Ultraviolet.
Références: Y a t’il encore des découvertes à faire et dans quel domaine, cuisson, mariages de saveurs ? Paul Pairet :
Plutôt qu’un produit, le point de départ est plus souvent une idée, un concept, un souvenir…extrait de cahiers d’idées collectées au fil des années. La recherche ressemble en fait beaucoup plus à un vaste chantier de tests et d’erreurs…quelque fois ponctué par des découvertes. La cuisine est un puits sans fond, un domaine dont l’immensité dépasse largement le cuisinier/ les cuisiniers.
Références: Quelle a été la véritable influence de la cuisine chinoise sur votre inspiration ? Paul Pairet :
Peu d’influence directe, si ce n’est que j’ai substitué majoritairement la sauce soja au sel pour les assaisonnements de fond (comprendre les sels dissous par la cuisson).
Références: Et de la Chine, que vous a t-elle apporté ? Opportunités, univers esthétique, dépaysement libérateur ? Paul Pairet :
Un peu de tout ça. L’énergie positive de la ville en mutation, la curiosité de ses habitants, l’impression de participer a la construction du Shanghai de demain, qui est déjà la Chine de demain.
UV Room Wood Automn © Scott Wright
Références: On est en période de Noël…Un mot sur le petit livre de cuisine de Grandma ? Paul Pairet :
C’est trop dire, mais c’est un peu ma bible. On m’a offert « Les bonnes recettes de Grand Mère Donald » à l’âge de 9 ans. Pour son époque, il cassait les codes de la cuisine classique avec poésie et irrévérence. C’est ainsi que j’ai pressenti mon intérêt pour la cuisine qui s’est finalement transformé en passion.
Références: A quand un Paul Pairet en France (en Europe) ? Paris, Londres, Moscou, l’ancien monde a t-il de quoi vous inspirer ?… ou alors, cuisiner « quelque part » dans l’espace ? Paul Pairet :
C’est une question d’opportunité qui fait sens. Si un projet intéressant et pour lequel nous sommes qualifiés se présente, nous le considèrerons. Développer sans se dissoudre est un vrai challenge.
Lire le reportage sur le restaurant UltraViolet by Paul Pairet: Lire l’article sur UltraViolet
Propos recueillis par : Marie-Christiane Courtioux
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