Tout le monde connaît l’Ami Jean, un restaurant situé rue Malar à Paris, mais peut-être moins, son chef propriétaire : Stéphane Jégo. Stéphane est loin du cuistot à la mode, l’un de ceux que l’on croise sur les plateaux de télévision ! Il est homme de partage, de générosité et de plaisir, autant dire : un artisan du goût qui interprète le produit frais issu de ses fournisseurs.
Ce matin à son arrivée, il a eu la bonne surprise de trouver sur le piano de magnifiques cèpes normands. Il sait déjà comment il les cuisinera avec ses deux chefs exécutifs : Boulag et Mouji… Stéphane Jégo triera ses champignons en mettant de côté, les bouchons. Des plus gros, il ôtera les têtes et les pieds. Les bouchons seront servis crus tandis que les autres se transformeront en carpaccio ou en rizotto.
Stéphane Jégo © L’Ami Jean – Stéphane Jégo
Le breton, Stéphane Jégo est né à Lorient. Il a 44 ans, un caractère trempé, deux filles et une charmante femme, Sandrine qui l’aide quasiment toute la journée et toute l’année en gestion. Dans l’arrière décor, est avec lui, une brigade et plein de petites mains passionnées : des stagiaires cuisiniers et un chef pâtissier. Ses jeunes pousses ne sont pas forcément issues des grandes écoles, il les forme lui-même, dès l’instant où il comprend ce qu’ils veulent : de la cuisine et du bon ! L’école de la vie est ce qu’il y a de mieux, non ?
C’est d’ailleurs comme ça qu’il montre l’exemple. Stéphane Jégo démarre par amour et rien d’autre en cuisine, à l’âge de 14 ans. Ses parents voulaient qu’il soit ferronnier d’art mais il ne savait pas tenir un marteau. En revanche, il connaissait l’usage du couteau ! A 16 ans, il passe son CAP de cuisinier. Très vite, il caresse l’espoir d’avoir sa propre affaire. Paradoxalement, l’armée lui apporte son aide. Nommé cuisinier au Carré des officiers du Génie militaire de Saint-Germain en Laye, le jeune chef apprend la rigueur du métier. Il se marie avec Sandrine et monte à Paris.
Là, il commence à dispatcher partout dans la capitale son CV… En vain. Un jour qu’il remet une copie au chef Christian Constant, à l’hôtel de Crillon, Yves Camdeborde qui l’appelait à cet instant, cherchait un cuistot pour le restaurant La Régalade qu’il ouvrait. Constant l’expédie dans ses cuisines… et il s’en souvient : le chef était en train de frotter un agneau à l’ail tout en l’observant. Imperturbable, il levait la tête pour lui signifier qu’il l’écoutait et qu’il le comprenait… Finalement, Stéphane reste chez ce chef grandiose durant quatorze ans.
Yves Camdeborde façonne Stéphane Jégo un peu à son image : un frère artisan du goût, un joaillier du produit. Il l’aide ensuite à trouver son propre établissement et le soutient financièrement. Voici pourquoi Stéphane Jégo lui porte autant d’amour et d’admiration… Qui a eu la chance d’avoir un tel père spirituel, un homme qui montre la voie ? A travers la fenêtre qui s’ouvre sur la salle de l’Ami Jean, le client écoute Stéphane taper dans ses mains à l’instant même où le plat est servi. Il colle à sa clientèle fidèle, celle qui l’a choisi et qui lui rend bien. Stéphane est un pro à l’esprit de famille. Il assure tous les soirs 70 à 80 couverts exigeants. On ne plaisant pas en cuisine.
A l’instant, un fournisseur pousse la porte. « Voici le kilo de crème fraîche que tu as commandé ! ». Stéphane est bien l’un des seuls à Paris à la recevoir ainsi des mains d’un petit fournisseur régional. Bruno Doucet, David Toutain, Jean-Pierre Genest, Christian Echebest, Bertrand Bluy sont des amis « relais » à lui qui parfois, profitent des commandes. Mais en ce cas présent, la crème fraîche filera droit dans un riz au lait d’enfer ! Aujourd’hui, à la carte du déjeuner, le client prend le menu Business club (35 euros, boisson non comprise), ou peut-être le Voyage-découverte (48 euros), ou plus encore la Carte blanche, un possible ris de veau, de la joue de bœuf, du maquereau cuit à 63° et assaisonné avec un trait d’huile d’olive, de fleur de sel, de thym de romarin.
Il y a des années, Stéphane Jégo avait inventé la caramélisation légère du maquereau brûlée quelques secondes avec de l’herbe aromatique, aujourd’hui le créateur va plus loin. Pour preuve son entrée officielle comme millième membre du Collège culinaire de France. L’institution, dont les présidents sont Alain Ducasse et Joël Robuchon ont pour délégué un homme du goût : Christian Regouby. C’est grâce à lui que Stéphane entre dans le cercle très fermé et il ne le regrette pas.
Comme ceux qui y sont déjà, il fera avancer les choses et il travaillera avec les artisans en direct. En treize ans, il manque seulement quatre services pour des raisons de santé… majeures ! A l’exemple de Stéphane Jégo, certains chefs jeunes et d’autres anciens démarrent en tirant sur ce qu’il appelle « des petits bouts de cordes ». Elles deviennent sous son contrôle et par son talent indéniable, de solides maillons. Comme les copains, il ne roule pas sur l’or mais il est heureux et sa petite famille aussi. Demandez à sa fille, Laurine, 7 ans.
Chez l’Ami Jean
27 Rue Malar, 75007 Paris, France
Tél. +33 1 47 05 86 89
Internet: lamijean.fr
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