Quelle est votre démarche en matière de cuisine?
T.M. : J’essaie de comprendre avant tout la structure….De mon côté, j’ai deux laboratoires de recherche (ateliers)… l’un à 200 métres au dessus du Château et l’autre à Paris…. Avec mes collaborateurs, nous cherchons…. Quand il y a quelque chose que nous ne comprenons pas, je me rapproche de quelqu’un qui connaît… Une personne qui a le savoir….Comme certains scientifiques… Ayant passé pas mal de temps au Japon… je m’intéresse aussi beaucoup à la sublimation du produit et sa structure. J’effectue beaucoup de recherches sur la forme, la couleur, la température et aussi la texture… Je pense qu’à un moment donné il faut aller plus loin dans la cuisine. A ce titre, je pense que c’est la science qui peut vous faire avancer dans la compréhension de certains phénomènes. Quel est le phénomène de transformation dans certaines recettes? le chef de cuisine est incapable de le dire… Alors, il faut bien que la cuisine évolue au même titre que la société… Avant, Il y avait Escoffier, mais je pense qu’aujourd’hui il faut sortir de tout cela. Si on regarde l’histoire de la cuisine française, on a toujours été dans le changement… Les goûts et les besoins évoluent. On se nourrit différement en 2007 qu’en 1907 ou qu’en 1807. Nos besoins ne sont pas les mêmes, le style de vie a changé et la cuisine se doit de suivre cette évolution. Par exemple dans les années 70, on attendait des chefs comme Guérard, Chapel ou encore Senderens, avec des styles culinaires qui correspondaient à la vie des années 70 par exemple… Cependant en France, dès que l’on touche à la cuisine, on se fait toujours passer pour un réactionnaire… Cela ne rend pas les choses simples. Et c’est toujours le même débat antagoniste entre les classiques et les modernes… Au XIXe siècle, c’est Monsieur de Talleyrand qui pousse Antonin Carême à aller de l’avant. Il n’y avait eu aucun changement en cuisine depuis les Medicis… Ainsi l’histoire démontre que le changement est vraiment nécessaire…à un certain moment.
Sur quoi travaillez-vous en ce moment?
T.M. : Avec mes collaborateurs, nous travaillons sur une émulsion (pour un scientifique c’est une mousse) afin qu’elle reste en suspension sur un produit chaud. C’est une sorte de mousse légère comme un nuage assez structuré ou encore une écume qui doit tenir au dessus… C’est un gros travail. Il faut y passer beaucoup de temps, trouver des répères, travailler sur la destructuration du produit pour pouvoir ensuite le reconstruire…
Quels sont vos restaurants préférés?
T.M. : J’aime les restaurants pas chers pour le quotidien, comme Pépé et Salé à Paris, ou encore à les frères Shan à Bordeaux (Au bonheur du Palais), c’est un lieu modeste d’approche, mais j’adore leur cuisine Séchuannaise… Pour la grande cuisine, mes références sont Pierre Gagnaire, Pascal Barbot et Joël Robuchon, j’aime les bonhommes et leurs démarches. Je me rappelle que ma première émotion de cuisine, c’était chez Pierre Gagnaire ; J’avais pris le train tout spécialement… C’était juste avant qu’il quitte Saint-Etienne… J’aime leur philosophie de la cuisine. Ils ont vraiment le respect du produit…Et cette philosophie est aussi la mienne.
Propos recueillis par Jérôme Chapman
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