© Droits Réservés Eric Laignel
« La Tour Eiffel, je la voyais tous les jours, en me garant de l’autre côté de la Seine. Aujourd’hui encore, je suis ému lorsque j’arrive au pied du monument, et que de l’ascenseur, je vois défiler l’enchevêtrement savant des poutrelles. Un restaurant sur la Tour Eiffel, c’était un rêve, qui demeure aussi fort alors même qu’il se réalise. Ce bonheur immense, j’aimerais le partager. Je voudrais qu’un moment passé au Jules Verne reste inscrit dans la mémoire de celui qui l’a vécu, et pouvoir ainsi être un marchand de souvenirs et d’émotions » confie, d’emblée, Alain Ducasse.
A la fin de l’année 2006, la SETE (Société d’Exploitation de la Tour Eiffel) choisissait la proposition conjointe de l’Affiche (Groupe Sodexho) et du Groupe Alain Ducasse pour moderniser l’offre de restauration de la Tour Eiffel. Porte-drapeau de cette offre, Le Jules Verne se dévoila après 120 jours de lifting : le 22 décembre 2007. Héritier d’un patrimoine exceptionnel, (rappelons qu’avant Ducasse, le chef Alain Reix était au piano), le restaurant Jules Verne s’appuya donc sur de solides fondations pour être rajeuni tel que le souhaitait Alain Ducasse. « Ce restaurant sera élégant et contemporain ».
© Droits Réservés Eric Laignel
Le décor est déjà un chef d’œuvre avant de passer à table! Moderne, il est en parfaite adéquation avec une cuisine soignée, créative, technique, simple et goûteuse. Patrick Jouin, designer complice du grand chef a repensé le décor en respectant bien sûr, l’histoire de la Tour Eiffel. Une paroi nid-d’abeilles en témoigne. A ses yeux, « observer le ballet incessant du service et des cuisiniers était primordial pour le client ». Les confortables fauteuils en fibre de carbone ont été réalisés par la célèbre maison Pini Farina.
Au plafond, un réseau de fibres optiques fait allusion aux rues de la capitale en prenant des allures de pieuvre à la Jules Verne ! Pierre Tachon, son créateur a rendu ainsi hommage à l’esprit de la Dame de fer… Pascal Féraud, 34 ans est le chef qui fut choisi par Alain Ducasse pour représenter la cuisine du Jules Verne. Sa carte française est contemporaine. En sa compagnie et avec la dynamique brigade, on y retrouve les bases d’une cuisine classique simple, saine et bonne.
Pas facile de cuisiner pour ce chef quand on se trouve accroché aux nuages du deuxième étage de la Tour Eiffel, un monument classé !
Les contraintes de sécurité sont grandes. Ici, l’électricité a remplacé le gaz. Fort heureusement, les fours à induction ont été inventés ! Cuisine généreuse, elle arrive sur table à exactitude ! Sous la férule de Francis Coulon, directeur de salle, déjà en poste depuis 2001, le service est au diapason : « élégant sans être pesant » dit-il. Et ce, dès l’instant où le convive a posé le pied dans l’ascenseur privé, côté pilier sud.
Cent vingt-cinq mètres plus haut, l’équipe habillée par la maison Lanvin l’accueille tout simplement. Envies gourmandes sans rien de spectaculaire ou de touristique, on apprécie ici aussi, la liberté.
« Nous avons souhaité que le nouveau Jules Verne apporte sa part de rêve dans l’expérience de la Tour Eiffel et nous et nous sommes comblés ! » a déclaré la Mairie de Paris quand elle a inauguré le restaurant dernièrement. Jouant avec la lumière naturelle qui s’offre tout autour sur la capitale, on profite de la vue. « Alain Ducasse aime son époque et il nous le rend bien ! » dit un serveur, plateau en argent dans une main et serviette blanche dans l’autre.
« Le vingt et unième siècle est un siècle passionnant, il a redistribué la donne en matière de comportements » répond Alain Ducasse tout en poursuivant : « là où nous avions un modèle unique, nous avons à présent une immense variété. ». Au cours des récentes années, le chef constate les nombreux bouleversements.
« La mondialisation, bien sûr mais longtemps, la cuisine européenne, et en particulier la cuisine française, ont régné sur la cuisine mondiale. Lorsque cette “ hégémonie ” a été remise en cause par la profusion des savoir-faire au niveau mondial, certains ont cru que l’on aurait droit à une homogénéisation des goûts ». Ducasse ne s’est, en effet, pas trompé puisque l’on assiste au contraire !
« Les gastronomes n’ont jamais tant recherché la vérité des saveurs. A quoi servirait-il de voyager si tous les paysages se ressemblaient… Il en est de même en cuisine ! On recherche des cuisines à la source de leur histoire ! Puis, vient le changement de comportement face à la manière de consommer… Avant, on se représentait le luxe d’une façon exclusivement verticale. C’était ce qu’il y avait de plus cher… aujourd’hui, cette vision est « horizontale » : toutes les consommations sont exceptionnelles parce qu’elles contiennent une forte valeur ajoutée de rêve ! ».
Pascal Feraud, le chef du restaurant Jules Verne © Droits Réservés Eric Laignel
« A la Tour Eiffel, on se régale d’une volaille à l’écrevisse, d’un bar à la Dugléré… Jus, sauces, bouillons ont été revus et corrigés façon “Ducasse“, c’est-à-dire : légers, savoureux, avec des goûts lisibles. Le dressage est toujours épuré. La cuisine de Ducasse n’est ni académique, ni futuriste » dit Pascal Féraud.
« Le Jules Verne n’a pas d’autre ambition que d’être lui-même, un endroit dans Paris qui offre du plaisir à la fois immense et accessible en termes de budget ! ». Chaises, assiettes, verres rappellent ici, en effet le rêve tel que devait l’imaginer le visionnaire, Jules Verne ou plus probablement : Gustave Eiffel ! N’oublions pas qu’au premier étage de la Tour, furent jadis installés aux 4 piliers, des restaurants internationaux : russe, hollandais, anglais-américain et français ! De l’autre côté des vitres, celles des cuisines, ça sent bon la pièce de bœuf en train d’être préparée par l’un des 47 cuisiniers de la brigade. A l’autre bout, on ficelle une volaille dodue. Et côté pilier Nord : le bar se fait caresser de Pascal Féraud. Il sera cuit dans son suc de tête afin de conserver un maximum de goût. « Je le crémerai très légèrement en fin de préparation ! » dit-il, en faire pâlir les gourmands. Le Saint-pierre qui s’apprête à son tour, à filer en salle a été traité dans le même esprit : cuisson à la vapeur et très courte.
« L’intensité a été mise à la première place grâce à un jus de coquillages filtré et lié au beurre demi-sel ! ». A la Tour Eiffel, comme on le constate, on sert très souvent « à la Dugléré »…
« Et qui était Dugléré ? » demande un convive à la table à côté. « Le bon élève du cuisinier Carême ! » répond un serveur parfaitement briefé. Les tomates qui lui seront servis auront été lentement confites. La volaille de Bresse mise à l’honneur aura été découpée en trois morceaux et traités de façon différente : blanc rôti, cuisse délicieusement confite au four et aileron désossé, farci dans les règles de l’art : poché puis rôti d’abord !
« Dugléré : c’est trois façons de goûter à trois saveurs et trois textures différentes ! » souligne Francis Coulon, intéressé par la conversation. Un trait de béchamel se pose tel un papillon sur mon grenadin de veau. Léger, maîtrisé techniquement. Il pare un morceau de viande d’une grande tendreté. Le dessert classique, un savarin servi avec sa fiole d’armagnac assurera en fin de parcours, mon bonheur suprême.
Un voisin de table choisit quant-à lui : l’Écrou au chocolat avec un praliné croustillant… Rappelons à ce propos que la Dame de fer s’appuie sur 2.500.000 rivets ! « Il y a cent jours de la floraison à la vendange ! » proclame Gérard Margeon, chef sommelier du Groupe Alain Ducasse. La carte du Jules Verne propose une sélection de grands vins de régions françaises, où les grands noms de vignerons côtoient les jeunes producteurs. 430 références, pas moins sont proposées au Jules Verne ! Invitation au voyage à travers d’exceptionnels terroirs : Bourgogne, Rhône et Bordelais, on y découvre des domaines peu connus parce que leur production s’exporte, pour la plupart. Côté Rhône : on se délecte de vins confectionnés toujours par la jeune génération de vignerons passionnés par la tradition vinicole française. La sélection bordelaise, quant à elle, se déploie à travers quatre routes distinctes : une palette de premiers crus, représentée par des millésimes, mais aussi à travers ses « cadets », ceux qui permettent d’apprécier les plus beaux seconds vins des premiers crus. Vient la sélection des seconds crus remarquables « les super seconds » qui nous font prolonger le rêve jusqu’au septième ciel. Et le champagne alors ? Il ne pouvait être autre que celui d’Alain Ducasse représenté ici, par une nouveauté servie, au choix, dans une flûte ou dans une coupe « Reims », réédition du modèle à jambes creuses des années 30 fabriqué par la cristallerie Portieux !
Bel hommage en effet que cette jambe hommage à la Dame de Fer. Un grand homme de l’histoire de France n’aurait-il d’ailleurs pas affirmé lors de l’inauguration de la Tour Eiffel « que ce monument était une jambe de femme en l’air, affublée d’un porte jarretelle ? »… Animés par la passion, talentueux et vraiment professionnels, les hommes et les femmes « Ducasse » du Jules Verne -105 en tout- forment une bonne complémentarité.
Le client le constate et l’apprécie, la Dame de fer n’a pas besoin de se nourrir d’épinards ! Merci à Pascal Féraud, Jemmy Brouet, Sébastien Péjus, Christophe Quentin, les sous chefs, Christophe Devoille, 28 ans, responsable de la pâtisserie qui assurent avec d’autres le bon plaisir de nos papilles.
Qu’on se le dise : c’est délicieux !
Le Jules Verne
Tour Eiffel
Avenue Gustave Eiffel
75007 · Paris · France
Tél.: +33 (0)1 45 55 61 44
Internet : www.lejulesverne-paris.com
Menus : 85, 120 (déjeuner) et 200 euros
A la Carte: 160 euros hors boissons